Quand je le fais, j’ai souvent l’impression de lire un carton publicitaire ou d’avoir l’air complètement coincé.
C’est difficile de vous expliquer clairement ce qui se passe dans mon bureau, parce qu’il s’y passe tellement de trucs différents.
C’est aussi difficile de parler simplement de choses complexes, même en essayant très fort.
Parce que la psychothérapie, c’est complexe.
C’est une rencontre entre deux personnes, entre deux univers, entre deux façons uniques de voir le monde.
Ça ne peut pas être simple. Du moins pas tout le temps.
En plus, si vous venez en psychothérapie, il y a de fortes chances que ça n’aille pas.
Que ça aille même mal. Que ça brûle.
Que vous ayez assez longtemps pensé que vous n’aviez pas besoin d’aide, que vous pouviez passer au travers, que personne ne pouvait comprendre ou que vous étiez seul à vivre une situation semblable.
Que vous ne compreniez pas ce qui vous arrive.
En plus, venir vous asseoir avec moi, ça se peut que ça brûle, ça aussi. Qu’on parle d’émotions difficiles. De peur, de tristesse, de colère, de désespoir, d’abandon, de rejet, de honte et de culpabilité. Qu’on mette beaucoup de temps et de ressources, ensemble, à explorer des thèmes que vous évitez d’aborder en temps normal.
Que vous faites absolument tout pour éviter d’aborder en temps normal.
C’est un peu étrange, de vouloir arrêter d’avoir mal et en même temps de venir vous asseoir avec quelqu’un qui vous parle de trucs qui font mal.
Et pour continuer mon anti-pub sur la psychothérapie, bin ça se pourrait que dans les semaines qui suivent, ça continue à brûler. Que ce soit même pire qu’avant.
À main levée, qui a envie de s’enfuir en courant?
J’ai décidé de ne pas vous vendre d’illusions. La psychothérapie, c’est complexe et c’est pas facile.
C’est pas toujours la guerre du Vietnam des émotions non plus, soyons clairs.
Mais c’est pas facile.
Pour une raison très simple, évoquée par mon regretté collègue Freud il y a plus d’un siècle : « Les émotions non-exprimées ne meurent jamais. Elles sont enterrées vivantes et reviennent nous hanter plus tard sous d’autres formes ». Cette simple idée forme le cœur du travail à accomplir en psychothérapie. Nous mettons tous en place des mécanismes efficaces pour éviter d’être en contact avec ce qui fait mal. Ces méthodes sont aussi nombreuses qu’inventives :
• À la mort d’un parent, se lancer dans le travail ou les détails techniques de la succession pour éviter les émotions intenses qui nous submergent
• Après avoir été rejeté et blessé dans une relation amoureuse, s’isoler de façon systématique pour s’assurer de ne plus vivre une peine aussi douloureuse
• À l’âge adulte, fuir les situations sociales comme la peste de peur d’être de nouveau ridiculisé comme lors de cette terrible présentation orale en 4ème année du primaire
• Suite à un échec en affaires, augmenter radicalement sa consommation d’alcool pour engourdir la honte liée à cet échec
• Faire des crises de colère pour évacuer la tension liée à des frustrations constantes au travail ou dans notre vie de couple
Nous utilisons une énergie considérable pour zigzaguer à travers les situations de la vie qui pourraient nous mettre en contact avec ce qui est le plus difficile. La plupart du temps, ces stratégies ont quelque chose d’automatique et de répétitif.
Les psychologues appellent ça l’inconscient.
Alors en psychothérapie, nous allons parler de ces émotions cachées/mises au placard/refoulées/ignorées. Trouver des mots qui fittent avec elles et, à votre rythme, essayer de découvrir de nouvelles façons de les vivre. Nous partirons aussi à la recherche de nouvelles manière d’agir dans votre vie de tous les jours. Les sensations envahissantes qui reviennent vous hanter sous un paquet de formes pas très agréables commenceront peut-être à prendre un peu moins de place, à devenir plus tolérables.
Et j’espère très fort qu’un matin, ça commencera à aller mieux. Pas comme un claquement de doigts. Pas comme une offre acceptée du banquier avec son gros bouton rouge. Pas comme la fée marraine qui vous transforme en princesse dans son carrosse. Mais un peu mieux. Un peu moins lourd. Un peu plus de plaisir et de saveur. Et que l’on pourra construire ensemble à partir de cette étincelle de mieux-être. Parce que je sais que la psychothérapie, ça marche. Pas toujours et pas avec tout le monde, malheureusement. J’aimerais que ce soit le cas, mais je vous ai bien dit que je ne vendais pas d’illusions. Mais je crois vraiment que ça peut fonctionner.
Aidé de mes collègues du CP3R, je veux donc utiliser les pages de ce blog pour vous expliquer comment ça fonctionne, pour démystifier un peu tout ce processus. Parce qu’il est bien possible que votre seul point de repère face à la psychothérapie provienne des séries télé et des films, là où notre profession est presque toujours caricaturée et dénaturée. Ou encore que vous ayez l’impression que les psychologues sont un peu comme des shaman/magiciens mystérieux qui lisent de vieux parchemins poussiéreux et lisent dans votre esprit en fumant la pipe. Nous ne sommes rien de tout ça. Mais nous sommes là pour vous et avec vous. Pour que vous puissiez aller mieux.